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Cinq ans d'enquête, par Manuel Boutet.

Notes du 05/02/2009:

1/ L'actualité de Mountyhall peut être rencontrée aujourd'hui sur Mountypédia et les Echos du Hall.
2/ Comment représenter un espace social en ligne, en perpétuelle transformation ? Deux exemples de réponses très différentes à cette passionante question de recherche sont, d'une part la page d'accueil de ce site, d'autre part la carte ci-dessous qui est tirée de mon dernier article publié.

Le texte ci-dessous a été écrit à l'automne 2006.

J'ai obtenus quelques résultats au cours de l'ethnographie que j'ai menée depuis la rencontre avec Mountyhall fin 2001 à cet automne 2006 où je suis en train de rédiger ma thèse. En attendant de l'avoir rédigée, je livre ici un bilan plus court destiné aux joueurs qui m'ont aidé tout au long de mon enquête.
Aujourd’hui, alors que je suis en train de rédiger ma thèse, je voudrais présenter ici le travail ethnographique que j’ai mené pendant cinq ans parmi les trolls et les joueurs de Mountyhall. Dans le modeste cadre de cette page web, mon choix est de retracer le cheminement de mon enquête, sous ses deux faces : dans Mountyhall, en Sociologie.

J’ai longtemps défendu l’étude de Mountyhall sur cette page web sous le titre de « trõllogie ». Le ton a varié: l’intérêt de cette étude, sa nécessité ou encore son urgence. Tout au long de mon ethnographie, cette page a toujours reflété ma position vis-à-vis de Mountyhall. Elle a pu être très « militante », à certaines périodes où j’étais engagé dans cette communauté. Puisque aujourd’hui j’envisage Mountyhall « depuis mon bureau », il est naturel que cette page rende compte de ce nouveau regard : un regard « académique ».

Le sujet de ce qui suit est mon exploration de Mountyhall, avec ses intuitions et ses erreurs. Je voudrais présenter mes hypothèses successives, chacune reflétant à la fois l’avancée de ma réflexion, ma position par rapport à la communauté, et l’état de cette communauté. Les changements au sein de la communauté de Mountyhall m’ont obligé à prendre les problèmes chaque fois sous un nouvel angle, et m’ont finalement aidé à avancer, bien que ce soit souvent avec le recul que j’aie compris de quoi il retournait. La méthode d’exposition adoptée ici consiste à attacher l’exposé aux différentes versions de cette page. Autrement dit, je pars de mes formulations à chaque époque. J’y rattache autant que possible les faits concernant la communauté du jeu, et mes réflexions sociologiques telles qu’elles apparaissent dans les articles que j’ai écris au cours de l’élaboration de la thèse.

Précisons encore que tout au long de ce travail, j’ai discuté longuement de mes idées sur le jeu avec les intellectuels de cette communauté. Mes inductions de sociologue paraissaient souvent bien vagues à ces acteurs éclairés qui ont une connaissance précise des événements du jeu, et aussi de leurs coulisses ; d’autant que ce sont eux qui aménagent les uns et les autres. Lorsque j’évoque mes prises de position, exprimées par les états successifs de cette page, ces prises de position prenaient sens principalement par rapport à ce dialogue. La « population » des joueurs n’est pas un interlocuteur, sinon imaginaire.

L'Echo du Hall m'a permis de participer à une belle aventure prenant vraiment la population des joueurs comme un « public ». Et cela m’a permis de mesurer le « public » de Mountyhall : sur une journée, on peut détourner des activités courantes un flux de 500 joueurs depuis les News et 150 depuis le Forum. Dérisoire. La part des activités "publiques" à Mountyhall est vraiment minime - surtout par rapport au bouillonnement d'énergies investi dans les sections privées des forums, et par messages privés, et par mails, etc.

Les trois versions précédentes de la page intitulée « Institut de Trõllogie théorique et appliquée ».

Beaucoup de sites gravitent autour de Mountyhall. Leur audience dépend de la capacité des joueurs à les trouver. Aussi l’audience d’un site dépend-t-elle beaucoup des liens établis vers lui depuis d’autres sites, et en particulier : par le site du jeu visité quotidiennement par ses joueurs ; par les sites de guilde visités quotidiennement par leurs membres. Or ces liens sont souvent le résultat de discussions dont on veut garder une trace : discussions sur les forums, ceux du jeu comme ceux de telle ou telle guilde, discussions à « la taverne » (le canal IRC de Mountyhall), discussions par la messagerie du jeu, etc.

Ce site a eu une assez bonne audience aux débuts du jeu, et beaucoup de sites de guilde, outils et encyclopédies pointaient sur leur page d’accueil, et dans leurs liens, vers « l’Université des trõlls ». Toutefois cette audience a diminué progressivement : d’abord à mesure que ma participation aux forums du jeu (http://www.mountyhall.com) diminuait, ensuite à mesure que je m’investissais dans d’autres sites, en particulier l’Echo du Hall (http://echoduhall.free.fr/Echo). Ma participation aux forums était devenue très faible au deuxième printemps du jeu (premier printemps de la « vf »), elle est devenue presque nulle suite à plusieurs confrontations violentes sur cet espace avec Stéphane alias Ghorghor Bey, alors deuxième développeur du jeu. J’avais critiqué « DM » à un moment où ce mot ne désignait plus seulement une personne appelée Yves, et prenait l’allure d’une autorité morale distribuée, parapluie de légitimité face aux éruptions forumiques trop violentes. J'attaquais « DM », ce gri-gri indispensable à la protection de l’embryon de ce qui deviendrait plus tard « l’équipe », et à la pérennité du jeu.

manifeste : le succès de Mountyhall « déborde » du jeu lui-même.

Si le jeu Mountyhall est bien comme le disent les joueurs « au cœur » de leur communauté, alors sans doute peut-on trouver quels traits du jeu ont favorisé son développement.

Cette page web

A mesure que Mountyhall se développait je ressentais le besoin d’une « communauté d’explorateurs », des gens avec qui discuter du jeu et de ses interprétations. (Je dois beaucoup aux conversations et aux passionnants échanges de mail que j’ai eu au cours de ces années avec des joueurs passionnés.) Je cherchais donc ce qui intéressait les joueurs. J’inventais un slogan : les joueurs aussi veulent mieux comprendre le jeu pour mieux jouer. La « trõllogie » était ce un point imaginaire où soucis de sociologue et préoccupations de joueur pourraient se rejoindre. (C’était au moins un outil pour mettre en rapport idées et observations.) Je mettais alors en ligne ce manifeste comme une bouée à la mer.

L’invention de la « trõllogie » part d’un constat : les trõlls se déplacent en « groupes de chasse ». L’originalité ne tient pas au fait que l’on joue à plusieurs, ce qui est plutôt la règle dans le domaine ludique, mais plutôt aux durées en cause. Les déplacements étant à Mountyhall des actions comme les autres, ils sont aussi lents que tout le reste, et les voisinages sont donc assez stables. En conséquence des trõlls peuvent se côtoyer pendant des jours, des semaines, voire des mois. La situation est donc très différente de la « demi heure de camaraderie » des jeux par partie ; très différente aussi des MMORPG classiques où les groupes se forment et se délitent au gré des connexions des uns et des autres.

J’hésitais à décider si la « trõllogie » était une « pseudo-sociologie » ou une « proto-sociologie ». L’expression de « pseudo-sociologie des avatars » avait été proposée par Nicolas Auray au cours des journées d’étude « Internet, jeu et socialisation » des 5 et 6 décembre 2002, organisées par le GET (Groupe des écoles des communications). Il désignait ainsi une étude du comportement des avatars qui s’en tiendrait à l’espace de jeu, et essaierait de faire une sociologie à partir de cette seule description, sans connaître les joueurs. Nicolas Auray suggérait ainsi deux choses : ce qui se passe dans l’espace de jeu est intéressant, mais il faut aller au-delà de cette familiarisation et mettre en oeuvre les outils sociologiques classiques.

Si je n’ai jamais été tout à fait satisfait de cette définition, c’est que pour y correspondre, une « pseudo-sociologie » devrait être une mauvaise sociologie des avatars. Entendons-nous : imaginons une ethnographie des jeux en ligne qui parte de l’espace de jeu. Elle observerait les avatars mener des activités et des conversations ensemble. (Or très souvent les joueurs évoquent leur vie. Admettons même que ces évocations n’aient pas lieu.) S’il y a quelque chose à observer c'est qu'ils s'organisent. S’il s’organisent ils formeront une guilde, qui aura un site. Ce site comportera un forum, ou au minimum une liste des membres avec leurs adresses d’e-mail ou de messagerie instantanée. Et l’on peut continuer. Autrement dit une bonne sociologie des avatars, qui se contenterait de suivre l’activité menée par les joueurs « au nom de leurs avatars », serait obligée de sortir de l’espace de jeu, et ne cesserait de croiser les joueurs en tant que tels.

L’expression de « pseudo-sociologie » ne correspond donc à aucune étude du jeu. En revanche, elle correspond bien aux idées que se font parfois les joueurs à propos de leur jeu. A l’image des « cyberespaces » de la littérature et des films, ils imaginent parfois que leur monde est un « monde séparé ». L’image porte en elle une belle intuition : ces mondes sont vastes. Malheureusement, elle méprise un peu les activités très élaborées qui font la vie d’un jeu. (Comme disent aujourd’hui les tenants du roleplay : il faut du travail pour qu'un monde soit riche et cohérent.)

Aussi l’étude de ce qui se passe sur l’espace de jeu correspond peut-être plus à une « proto-sociologie » plutôt qu’à cette hypothétique « pseudo-sociologie ». J’emprunte le terme de « proto-sociologie » à Louis Quéré, qui désignait ainsi l’étude de la genèse des formes sociales. On transposer cette idée au domaine ludique, où une « proto-sociologie » s’intéresserait à la genèse des capacités d’intervention des joueurs et aux formes que pourrait prendre leur action, autrement dit aux styles de jeu inventés par les joueurs qui sont autant de façons de jouer avec les règles souvent inattendues pour les concepteurs. Alors la « trõllogie » regarderait comment de nouvelles formes de jeu émergent progressivement: les groupes de chasse sont la base du jeu ; les guildes et les groupes de chasse sont deux choses différentes ; les styles de jeu se développent d’abord et les règles sont modifiées ensuite en conséquence ; etc.

Cette idée de "trõllogie" était très dépendante comme on va le voir, de ce qu’était Mountyhall à l’époque et de la façon dont je le comprenais.

Contexte et sociologie

Dans cette première année, Mountyhall se développe de façon exponentielle et surtout ne colonise pas n’importe quels espaces. Beaucoup de femmes y jouent, quoi que beaucoup soient recrutées selon un schéma assez classique : par leurs conjoints ; leur nombre indiquerait toutefois qu’elles acceptent plus volontiers qu’ailleurs, et que leur participation est plus suivie. D’autres formes de diffusion sont plus originales : des parents vers les enfants, des enfants vers les parents ; et entre collègues de travail, entre pairs mais pas uniquement (des cas sont observés de diffusion de haut en bas de l’échelle hiérarchique comme de bas en haut). Le principe de « guilde » n’existe pas encore et la plupart des regroupements de trolls correspondent à des joueurs qui se connaissent en dehors du jeu.

Mon premier article est publié dans l'ouvrage collectif « La pratique du jeu vidéo: Réalité ou virtualité ? » (Note: en sociologie, nous écrivons le plus souvent pour la science, sans intéressement financier; Vous pouvez tout de même me sponsoriser en utilisant ce lien web pour commander le livre... grâce au "partenariat" entre l'université des trõlls et alapage.) Comme je l'explique plus loin, je n'aurais pas choisi ce titre là. Il n'en reste pas moins que ce livre vaut le détour. Divers et hétéorgène, avec tout de même une ligne éditoriale forte, il donne une bonne idée de l'état des recherches françaises sur cette question au moment de sa parution... et sans doute aussi aujourd'hui.

A cette époque, le jeu Mountyhall n’a pas été profondément modelé comme aujourd’hui par sa communauté de joueurs. Il s’agit encore d’un petit dispositif assez simple et très contagieux. Surtout il est encore facile de distinguer entre « le dispositif de jeu » et « le jeu tel qu’il est joué ». Après un an, Mountyhall atteint 1500 joueurs (ce qui me paraît alors énorme, c’est en effet à peu près le nombre de joueurs de l’ancêtre, Taupedélire). Je publie alors un article intitulé : « Des jeux d’adultes ? Corporéités et socialités dans les cyberespaces ludiques. » J’y porte tous mes efforts sur ce que j’appelais « l’articulation entre le jeu et la vie des joueurs ». Lorsque je le relis aujourd’hui, j’y aperçois une hypothèse très forte : vie ludique et vie sociale se développent autour de Mountyhall selon des logiques tout à fait distinctes. Cela imprègne l’article comme une conviction inexprimée. Or si cela correspond bien à ce qu’était Mountyhall à l’époque, cette vision a déçu certains de mes collègues sociologues : il leur semblait plus intéressant d’étudier la façon dont jeu et vie sociale s’interpénètrent que la façon dont ils s’articulent. Ils considéraient cela comme un choix de ma part, une orientation problématique. Et en un sens ils avaient raison : le jeu s’était déjà immiscé dans les vies de certains ; c’est pour cela que dès cette époque des changements de règles ont pu entraîner des départs. Mais ce n’étaient encore que des cas isolés, et le jeu était plus souvent mis au service de sociabilités pré-existantes (couples, collègues de travail, familles, amis, clubs, etc.) que générateur de son propre tissu social comme c’est le cas aujourd’hui.

Il est intéressant de décrire ce premier état du jeu. S’il y a alors indubitablement rencontre entre « en jeu » et « hors jeu », c’est une rencontre sans mélange. Le jeu et la vie des joueurs sont distincts et… « en affinité ». Nous reprenons ici la notion d’« affinité élective » par laquelle Max Weber désigne dans sa célèbre étude « l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme » un rapport de même type. (Protestantisme et capitalisme n’appartiennent pas aux mêmes séries causales, c’est-à-dire qu’aucun d’eux n’est la « cause » de l’autre. Pourtant l’éthique protestante a pu à certaines périodes de l’histoire et en certains lieux particuliers être en « affinité élective » avec l’esprit du capitalisme. Ce qui signifie pour Weber que certaines formes de protestantisme ont pu former un type d’homme, qui s’est révélé adapté au capitalisme de l’époque.) Ici le jeu est adapté à la vie des joueurs, et il s’agit de préciser de quelle façon.

L’article devait s’intégrer dans un dossier sur le « virtuel ». Cette question du « virtuel » m’agaçait car lorsque je regardais mon terrain, Mountyhall, il était évident que les joueurs n’utilisaient pas cette catégorie. Plus exactement, et c’est toujours vrai, les joueurs utilisent ce mot à l’occasion… parmi beaucoup d’autres. Certaines distinctions ont reçu leurs sigles : jeu et hors jeu, en ligne et irl, rp et hrp, etc. Plus généralement, la distinction entre « virtuel » et « réel » ne décrit pas bien cette multiplication des scènes, dont l’important n’est pas seulement de savoir si elles sont « réelles » ou non. Autour du jeu les lieux en ligne se multiplient ; chaque messagerie et chaque forum ont leurs habitués, et nous n’y fréquentons pas chaque fois les mêmes cercles. Si la distinction entre « réel » et « virtuel » n’est pas un bon guide d’observation, c’est qu’elle risque d’amener à négliger d’autres distinctions plus naturelles aux acteurs.

Pour autant travailler dans le cadre de ce dossier a été fructueux. Ce que j’ai essayé de montrer dans cet article, s’énonce finalement en deux temps : il y a bien quelque chose comme le « virtuel » qui a sa propre logique ; mais la participation à cet univers, l’adhésion à cette logique, s’explique par son affinité avec les préoccupations quotidiennes.

plaidoyer : il y a urgence à « étudier » Mountyhall.

La communauté s’étant développée, la proposition qui faisait l’objet du premier manifeste apparaît alors comme une évidence : n’importe quel observateur sincère, et il y en a quelques uns, remarque que Mountyhall n’est plus seulement un bout de code informatique. A cette époque, Mountyhall connaît une grande variété de phénomènes collectifs : des expériences sont partagées, des groupes se forment et leurs relations se structurent, des courants d’opinion naissent et se propagent. Or si les joueurs curieux sont nombreux, peu d’entre eux agissent en explorateurs consignant leurs découvertes.

Contexte et sociologie

Au cours de la deuxième année du jeu j’écris un article, an apparence éloigné de Mountyhall, mais qui permet de répondre à la question soulevée précédemment : à quoi tient l’affinité entre le jeu et les préoccupations quotidiennes. Toutefois, ayant mis un an à répondre à cette question, mon objet m’échappait déjà. Lorsque l’article parut, au milieu de la troisième année d’existence du jeu, les guildes avaient fleuri depuis longtemps, l’équipe du jeu était en voie de constitution, et mon autre terrain – le dépannage informatique – occupait mes pensées.

Le numéro de la revue contenant mon second article est épuisé, une mise en ligne est discutée. On peut trouver une fiche de lecture sur cet excellent numéro.

L’article s’intitule « Statut et lectures des pauses en sociologie du travail. Un objet d’étude impossible ? » Le cheminement qui m’avait mené là depuis Mountyhall est intéressant. Les joueurs se connectent de chez eux, mais aussi très souvent de leur lieu de travail ou de leur lieu d’étude. Comme j’étais à la recherche des « articulations » entre vie ludique et vie sociale, l’espace professionnel m’intéressait tout particulièrement. Beaucoup de groupes de trõlls, et ce depuis les débuts du jeu, sont collègues. Je voulais inscrire mes observations dans un cadre plus large, aussi je cherchais ce que l’on fait pendant sa pause lorsqu’on ne connaît pas Mountyhall.

Malheureusement, mes recherches bibliographiques ne furent pas couronnées de succès, du moins pas dans la direction espérée. Je trouvais très peu d’informations sur les activités menées pendant les pauses. Ces activités sont au mieux évoquées. Par exemple dans la description d’une salle de pause le chercheur signale des « magazines », sans précision. Tout laissait penser que l’information que je recherchais n’existait pas.

Toutefois, j’avais discuté de mes recherches et de mes lectures avec mes collègues, aussi j’eus la chance de participer à un dossier portant sur « la sociologie au travail aujourd’hui et ses catégories ». J’avais passé beaucoup de temps à pister les pauses au sein des travaux de sociologie du travail, aussi avais-je une idée des motifs et raisons qui avaient poussé les sociologues non seulement à oublier d’en parler, mais à l’oublier avec beaucoup de constance et de volonté.

La sociologie du travail de tradition française entretien une position tout à fait ambiguë vis-à-vis des pauses. Pour cette sociologie critique, la vie d’usine est la lutte. Aussi se trouvent souvent éludés tous ces moments où l’on forge ce que l’on ne sait pas encore être des armes – ces moments où l’on vit encore (juste avant de dire : « c’est pas une vie »). Autrement dit, d’un côté les pauses sont évacuées comme « hors travail », de l’autre des phénomènes sont réintroduits au centre de l’analyse qui prennent naissance justement pendant les pauses. Cela vaut en partie pour le « collectif de travail ». Un autre exemple est le recours presque exclusif à l’entretien comme méthode d’observation, souligné au début des années 80 dans un soucis de renouvellement de la discipline. (Des travaux ont alors rompu avec cette étude du langage à propos du travail, pour s’attacher au langage dans le cours du travail. Cette piste s’est révélée très riche.) Or où s’élaborent les discours recueillis au cours d’un entretien, les vocabulaires mobilisés et l’organisation de l’expérience relatée ? L’entretien a bénéficié du développement d’une riche méthodologie ; mais cette méthodologie étudie les émetteurs et destinataires de la parole recueillie, aussi a-t-elle pu éloigner de la question de la genèse de cette parole. En contrôlant au plus près tous les paramètres de la rencontre, le chercheur peut céder à l’illusion d’une détermination endogène : les récits se développeraient sur les lieux, les rationalisations seraient un effet de circonstance. Autant d’occasions d’oublier le riche arrière plan des discussions entre collègues sur le travail, et sur le contenu du travail, qui ont lieu (notamment) pendant les pauses.

Les pauses et le temps de l’activité ne bénéficient pas de mentions explicites au sein de cette littérature, mais s’y laissent observer en filigrane. Comme je l’avais fait précédemment à propos du « virtuel », je travaillais dans le sens d’une sociologie descriptive : c’est-à-dire en prenant soin de faire la part de la description des activités et de leurs étiquetages conventionnels a posteriori, tels que travail ou hors travail, discipline ou résistance. J’écrivais au terme de mon enquête : « L’activité de travail n’est pas constituée d’un seul temps homogène – le temps de travail – et de ses interruptions, mais bien d’activités se côtoyant et s’entrecroisant selon des temporalités qui se chevauchent ; et ces activités ne sont pas toutes rangées par les acteurs sous la catégorie de « travail ». » (Boutet, 2004, p.14) Nous retrouvons l’idée « d’affinité », ici entre ce qui est nommé « travail » et ce qui est nommé « pauses » au sein de l’activité.

J’ai écrit plus tôt que cet article m’avait permis de répondre à la question des « affinités » entre vie ludique et vie sociale. En quoi consiste cette réponse ? Dans mon premier article j’avais formulé une première hypothèse : le jeu est un lieu d’action, autrement dit il s’agit d’un cadre bien plus intéressant que la vie quotidienne pour « mettre en jeu » sympathies et fidélités. Cela vaut assez bien avec les gens que vous connaissez déjà et qui jouent avec vous : le jeu ajoute ses rebondissements au quotidien de votre relation. Mais dès lors que vos partenaires de jeu ont été rencontrés dans le jeu, cet effet ne vaut plus. (L’idéologie du « roleplay » suggère aujourd’hui parmi les joueurs qu’il « ne faut pas confondre le trõll et le joueur ». C’est un principe d’action, mais est-ce que cela décrit l’intérêt et le plaisir que le joueur prend à jouer ? Non.)

Finalement, la réponse ne tient pas tant pour moi au contenu du jeu, mais bien à sa structure temporelle. Cette structure temporelle est compatible avec la plupart des activités, et elle établit un espace commun.

  • La structure temporelle du jeu correspond parfaitement à la structure temporelle de l’activité de travail dans laquelle sont enchâssées les pauses (et cette structure temporelle est sans doute commune à la plupart des activités sociales) :

    « Qu’est-ce qui se trame dans une cigarette ? Une consumation, une dépense, un sacrifice, une esthétique [Bataille, 1967]. Un instant est doté d’une qualité particulière : une fois passé, la mémoire pourra s’y attacher ; anticipé, il est attendu. On reconnaît là la structure du temps social, qui est en particulier celle des rites.

    Ne considérer que la production, ou même l’action, laisse à penser ce que l’on fait pendant les pauses comme insignifiant. Or, le temps de l’activité est bien sûr nourri de ces moments utiles et de ces moments forts, mais il ne serait rien s’il n’était également tissé à partir des attentes et des souvenirs. » (Boutet, 2004, p.14)

    Nous rejoignons là les nombreux témoignages où des joueurs résument ainsi l’intérêt du jeu pour eux : arriver à se lever le matin.

  • Nous pouvons alors essayer d’expliquer le succès du jeu. D’un côté, chaque joueur peut participer par de petits moments de jeu dispersés tout au long de la journée ; il peut donc jouer selon ses disponibilités, et quelles que soient ses difficultés pour accéder à internet – du moins s’il y accède presque chaque jour. De l’autre côté, l’ensemble du monde de jeu suit un rythme collectif réglé sur le temps de tour moyen : 12 heures ; ce temps de tour correspond aux rythmes sociaux extérieurs au jeu. (Les « dérives d’horaires » dues à des DLAs plus ou moins courtes créent une légère désynchronisation, qui peut toujours être corrigée par décalage de tour, mais qui est aussi une source inépuisable de situations inattendues et cocasses lorsque le joueur essaie de jouer à des heures peu propices.)

    Quel est l’intérêt d’un tel dispositif ? Il tient aux évolutions actuelles des temps sociaux. Qu’est-ce qui a changé ? « Avant » tous les temps sociaux ressemblaient à ce temps que décrit Robert Linhart, dans son ouvrage l’établi. Au moment de la pause légale, la chaîne de montage est arrêtée ; autrement dit tout le monde prend sa pause au même moment, les sandwichs sont sortis et les conversations partagées, réunissant les ouvriers par petits groupes, sur des bancs ou à défauts sur une volée de marches. Les rythmes sociaux de l’usine sont synchronisés : « Avec toujours les mêmes échanges de mots, les gestes habituels, l’attente du casse-croûte du matin, puis l’attente de la cantine, puis l’attente du casse-croûte de l’après-midi, puis l’attente de cinq heures du soir. » (Linhart, 1989, p.50) Les pauses collectives sont l’occasion de mises en scène du collectif de travail : « Une minute. On nous a volé une minute. C’est celle là précisément qui nous aurait reposés, et elle est perdue à jamais. Parfois, quand même, leur mauvais coup ne marche pas : trop de fatigue, trop d’humiliation. Cette minute-là, ils ne l’auront pas, nous ne nous la laisserons pas voler : au lieu de retomber, le vacarme de la colère s’enfle, tout l’atelier bourdonne. Ça hurle de plus en plus, et trois ou quatre audacieux finissent par courir au début de la chaîne, coupent le courant, font arrêter à nouveau. » (Linhart, 1989, p.52)

    Cette situation d’un temps collectif synchronisé, d’une pause légale commune, est aujourd’hui l’exception. Le jeu offre de reconstruire, à partir des ressources limitées et désynchronisées de chacun, un espace partagé et fortement rythmé. Un « espace d’action » comme dans notre première hypothèse, mais dont la principale caractéristique est de construire un temps commun. Et cet intérêt peut être trouvé au jeu avant même qu’existe une « communauté » de Mountyhall, avant que le monde de jeu ait sa propre histoire, ou encore qu’un tissu social se soit tissé autour de cette pratique. Il suffit que quelques collègues, camarades ou copain s’y retrouvent devant les mêmes épreuves, qu’un couple décide d’y faire quelques pas ensemble, ou qu’une famille y trouve la source inépuisable d’histoires partagées.

    Le jeu prend le « monde moderne » tel qu’il est, avec la forte individualisation des temps qui le caractérise, et reconstruit avec ces matériaux hétérogènes une temporalité commune, qui ressemble tout à fait aux « temps sociaux » traditionnels.

    Il a souvent été remarqué que le temps du jeu était un peu absurde à Mountyhall : les trõlls font très peu de choses, comme s’il se passait seulement quelques minutes dans l’univers de jeu. Mais les trolls « vieillissent » beaucoup plus vite que cela ; leur façon de gagner de l’expérience et d’apprendre laisse plutôt entendre qu’il se passe vraiment un jour (voire plus) dans l’univers de jeu pour chaque jour réel.

    Or ce temps qui semble si étrange pour un univers de jeu ressemble beaucoup au temps des relations sociales, au temps des relations d’amitié : quelques mots échangés, quelques activités communes, et déjà le jour suivant ; peu d’action et pourtant le temps passe.

Cette page web

Même si l’inventivité était déjà grande avant la VF (version finale), elle a apporté un foisonnement incroyable. Beaucoup plus de joueurs qui apportaient leur enthousiasme et leur imagination, et simultanément une volonté de capitaliser puisque les trõlls ne disparaîtraient plus. (Pendant toute la « bêta » il était clair que les trõlls seraient effacés à la fin. Entre « béta » et « version finale », le jeu a été réinitialisé ; les tours de jeu ont été fixés à leur durée définitive de 12 heures. Toutefois les règles ont continué à être souvent remaniées.) Mais plus le foisonnement devenait dense, plus la volonté de mise en ordre devenait forte. Cela a amené à un durcissement progressif des discours, qui n’a fait que se renforcer ensuite. A l’époque certains croyaient à leur vision et cherchaient à persuader. (Aujourd’hui certains sont en charge de « la vérité du jeu » et ont le pouvoir de l’imposer. C’est un processus que l’on appelle en sociologie « institutionnalisation ».)

C’est à cette époque, avec l’idée de maintenir vivante la curiosité pour ce qu’était vraiment le jeu – au-delà des mots d’ordre et des doctrines – que j’ai créé une nouvelle page de l’Université des trõlls : « le Tombinoscope des trõlls et de guildes ». J’essayais à l’époque d’aller « contre » les discours « durs » qui cherchaient plus de « cohérence » en réduisant le jeu à des vues étroites. Je voulais montrer de la façon la plus claire et indubitable la richesse que Mountyhall tirait de sa diversité. Pour autant je ne crois pas que le Trombinoscope ait eu en lui-même beaucoup d’effet. Après tout ce ne sont rien d’autre que des images mises à la suite les unes des autres.

Reste que pour ma part, j’en apprécie beaucoup le miroitement. Et quand j’observe l’étendue de cette vie ainsi rendue manifeste, cela me donne un léger vertige. Ce même vertige que j’ai toujours lorsque je parcourre la banlieue parisienne en train et qu’à un endroit où la voie est surélevée je regarde par la fenêtre pour voir ces interminables alignements de rues et de maisons. Je sais alors – sans avoir la force de les imaginer – toutes les vies qui se déroulent dans tous ces lieux, semblables et singulières. (Dernièrement j’ai découvert un sentiment un peu différent avec google earth : il est incroyable comme vues du ciel toutes les zones urbaines se ressemblent ; et cela me donne chaque fois la conviction profonde que des choses essentielles se jouent dans les « détails ».)

Cette époque a surtout été celle des guildes… et des listes. Chaque guilde fait ses listes : sites utiles, outils utiles, amis, ennemis, etc. qui forment l’essentiel du contenu de leurs sites. Les joueurs font aussi des listes, qu’ils stockent sur leur ordinateur dans leurs « bookmarks » ou « favoris ».

Dans certains cas ces classements sont systématisés :

  • à propos du Hall (bestiaires, encyclopédies, etc.) ;
  • à propos des guildes (diplomatie des guildes, etc.) ;
  • à propos des sites (pages de liens, outils, catégories d’outils, etc.).

Et là on peut distinguer deux genres de mise en ordre :

  • D’un côté les « encyclopédies » à proprement parler, tous les sites qui proposent des classements raisonnés. Il s’agit alors de mettre en regard tout ce qui existe dans une catégorie donnée : une page pour les trésors, une page pour les monstres, une page pour les champignons ; une rubrique pour les sites, une rubrique pour les forums, une rubrique pour les outils. Le principe est alors celui du « OU BIEN », séparant soigneusement tout ce que le jeu lie ensemble.
  • De l’autre côté les rangements « pour jouer », dont les sites de guilde fournissent un exemple fameux. Le menu de chacun de ces sites est une petite liste des choses dont on a besoin. Il pointe sur le forum de guilde, le forum officiel, l’entrée du jeu, les outils que l’on a programmés et les meilleurs outils trouvés chez les autres.

Pour mon travail de sociologue j’étais un peu embêté : je disposais soudain d’une masse remarquable de données sur l’univers du jeu ; mais de très peu de choses sur la façon dont elles étaient utilisées, sur les façons de circuler entre les sites. Ce n’était pas tant la classification qui me posait problème que le cloisonnement et l’oubli. Ces classements supposent d’éviter de mélanger ce qui est différent, alors que « jouer » suppose au contraire de tout mélanger. Comme je l’avais fait pour l’articulation entre vie ludique et vie sociale, je récoltais patiemment sur les forums les indices des façons de naviguer pour jouer.

inventaire raisonné

A cette époque, je collecte patiemment des textes. Encore faut-il que ces textes existent…

Contexte et sociologie

L’arrivée du « roleplay » militant est venu prolonger et renforcer les autres mises en ordre. Il affirme que le discours légitime est celui qui ne parle « que du jeu », et qu’il ne faut surtout pas mélanger les registres. Selon cette idée, il faut séparer clairement les moments où l’on parle en tant que trõll et en tant que joueur ; il ne faut pas en vouloir au joueur pour les (ex)actions de son trõll ; le travail des animateurs doit être passé sous silence. Le « roleplay » a des avantages indéniables en termes de jeu, en renforçant l’indépendance et la cohérence de l’univers de jeu. Il permet le développement de séquences de jeu beaucoup plus élaborées.

Selon ses zélateurs, le « roleplay » est une forme de « jeu pur », et tout ce qui est « HRP » (hors roleplay) est forcément « HJ » (hors jeu). Le joueur en train de jouer, ses pratiques, ses expériences, ses sentiments, n’ont plus droit de citer. Se trouve rejeté car très suspect tout discours qui mettrait en évidence les ponts qui existent dans notre expérience de jeu entre intendance (interface, règles, etc.) et imaginaire (le monde des trõlls). Les sites continuent de se développer, mais ils sont discutés uniquement pour ce qui est des « outils » de telle ou telle catégorie particulière : les bestiaires, les vues, etc. A partir du moment où le « roleplay » militant se diffuse, tous les « inventaires pratiques » (tels que les menus des sites de guilde) cessent de faire l’objet de discussions publiques.

Etant donné ma situation, j’ai ressenti cela de façon assez violente, alors que tous ceux que j’ai interrogés par la suite ne se rappellent pas d’un tel événement. Mais pour moi cela a signifié que d’un mois sur l’autre ou presque, les forums ont été vidés de toutes les allusions que les participants faisaient jusque là à leur expérience de joueur. A un moment donné la plupart des passionnés ont cessé de faire référence à leur vie de joueur dans leurs interventions publiques (et simultanément des prêcheurs traquaient et condamnaient avec quelque véhémence ce genre d’interventions hors-jeu là où elles subsistaient). C’est la raison pour laquelle je parle d’ « arrivée » : oui le « roleplay » était là depuis le début, mais tout d’un coup il devenait le Crédo de tous les passionnés. Le « roleplay » était un style de jeu vraiment passionnant à suivre dans son développement et ses ramifications. Mais pour moi la réflexion sur le jeu, la mienne comme celle des joueurs, se trouvait tronquée et coupée d’une part essentielle.

La forme originale de Mountyhall vient largement de l’idée qu’un adulte qui a une vie normale et équilibrée à laquelle il tient, doit pouvoir jouer à ce jeu-univers, et y jouer aussi bien de chez lui que de son lieu de travail. Ce genre de réflexivité créatrice devient quelque peu difficile (!) dans un contexte où le joueur doit (!) s’effacer derrière son personnage.

L’effet sur mon travail était patent. Trouver les réflexions des joueurs sur le jeu n’était plus un exercice de lecture mais un vrai jeu de piste : elles étaient évacuées pour l’essentiel du forum de mountyhall – le seul lieu officiellement ouvert aux réflexions « en tant que joueur » porte le nom de… « hors-jeu » ! bizarre tout de même ! – et les forums de guilde présentent trois obstacles : ils sont beaucoup trop nombreux pour un seul homme, ils ont tous des sections privées, et le regard extérieur se retrouve noyé dans la « conversation quotidienne » qui s’y déploie.

On peut donc considérer qu’à partir de ce point, l’espoir auquel j’avais donné le nom de « trõllogie » est mort. Il me fallait une autre idée, et si possible beaucoup plus vigoureuse !

Tous les passionnés du jeu ont été convertis au roleplay. Ils ont continué à discuter entre eux des façons dont le jeu grandi pour de vrai, mais cela n’a plus fait l’objet que de discussions privées, par messages privés, par mails, ou pendant les petites IRLs qui s’organisent entre gens qui se connaissent déjà. J’ai tendu l’oreille, mais désormais j’étais seul.

Pour différentes raisons, les discussions avec les organisateurs se sont révélées difficiles. A partir du moment où l’organisation cesse d’être publique, consiste en échanges de mails, il est impossible pour l’ethnographe de demander à ce que lui soient ré-expédiées des correspondances qui sont… privées. Etudier le roleplay, c’est comme étudier la sexualité des français, on se contente de ouï-dires. Ou alors on pose des questions directes : je les ai posées, et je dois dire qu’en général on m’en a voulu. A une époque, les organisateurs du « rp », les animateurs de Mountyhall, me haïssaient tous.

Cette page web

Cette page est alors devenue le miroir d’un autre lieu.

Lorsque j’ai lancé l’Echo du Hall, l’idée d’un journal me trottait dans la tête depuis longtemps. J’avais vu vivre et mourir la « gazette » de Mountyhall, qui avait été fondée et animée par Loinvu au cours de la « béta ». En vérité, j’attendais simplement que quelqu’un d’autre se lance à son tour dans cette aventure. Pour que je me décide à donner moi-même le coup de pouce décisif, il a fallu l’arrivée du « roleplay ».

L’Echo du Hall c’était alors l’idée qu’il restait possible de penser le jeu comme un tout : accompagner le « roleplay », réfléchir en tant que joueur, et raconter des histoires « imaginaires ». Cette gazette du jeu a eu depuis une longue histoire, façonnée par tous ceux qui y ont simplement contribué ou l’ont carrément rejointe. Je regrette que le « roleplay » ait largement déserté ses colonnes. Entre autres raisons, les plus motivés à nous rejoindre étaient ceux qui ne trouvaient pas d’autre espace ailleurs, alors que justement le « roleplay » occupait de plus en plus d’espace.

Ajoutons que les roleplayeurs les plus motivés nous ont beaucoup écrit dans un premier temps, mais uniquement pour nous ramener dans le droit chemin : être « roleplay » ou n’être rien. Le « roleplay » est une entreprise de purification, donc faire du roleplay et autre chose c’est ne pas faire de roleplay. A leurs yeux en tout cas. La situation est la suivante : les passionnés sont convertis, mais sont minoritaires, la grande majorité des joueurs... jouant à un petit jeu web. Du coup, aux yeux des joueurs les plus actifs, il n’y a « place » sur le réseau public que pour un discours sain sur le jeu, le roleplay. Tous les autres discours sur le jeu peuvent être « rangés » maintenant au plus profond des forums de guildes.